Analyse - L'intervention de DSK vous a-t-elle convaincue ?

Je souhaite m'intéresser ici à l'exercice de communication auquel s'est livré DSK. il ne s'agit pas de savoir si DSK nous dit la vérité, s'il est coupable ou pas, s'il joue avec le rapport du Procureur comme le disent certains, bref il s'agit juste d'une analyse de l'exercice. C'est sans doute un des exercices les plus compliqués à réaliser, car beaucoup de gens vous considèrent toujours comme un coupable potentiel, en tout cas "il n'y pas de fumée sans feu comme on dit !", de plus, le procès civil est en cours et l'affaire Française également. Donc la liberté de parole n'est pas totale, il s'agit d'un homme public et politique, de 2 affaires de mœurs, le contexte est donc explosif et l'homme exposé.

Alors, convaincant ou pas ?



Oui cet exercice était convaincant : 

Un fond assez brillant et étudié
Sur le fond, l'exercice est assez brillant. Les mots sont choisis, pesés, calibrés, réfléchis, rien n'est laissé au hasard. Il n'y a pas grand chose à reprocher au travail qui a été fait, mis à part quelques formules assez étranges dans ce genre d'affaire ou peu utilisées en langue française. Au delà des mots, le fait de s'appuyer constamment sur le rapport est assez habile, quitte à jouer un peu avec le contenu lorsqu'il est un tout petit peu flou, mais cela ne donne que plus de valeur au travail et l'habilité des conseillers. DSK (et surtout ses conseillers) a réussi son examen de passage.

Une mise en scène efficace
Même chose pour la mise en scène, DSK opte pour une posture solennelle, très sobre, respectueuse, un peu fermé (juste ce qu'il faut). Les mains bien à plat, le dos droit, le regard posé et calme. Il a opté pour une gestuelle assez limitée, bien appropriée et il joue habilement avec le rapport du procureur sur des moments bien choisis, qui marque et martèle le fait que si le Procureur le dit, c'est que cela EST vrai.


Non il ne l'était pas :

Un exercice mécanique
On sent que tout a été pensé, répété et répété encore, très travaillé, trop travaillé, mal travaillé ? c'est un peu là que le bas blesse, l'exercice a sans doute été répété à l'extrême. Mais, cela nous donne une attitude très mécanique, heurtée, avec un rythme cyclique et monolithique.

Un exercice manquant de naturel
Toujours du à une répétition à l'extrême, DSK perd tout son naturel, toute émotion, tout humanisme. Cela se traduit par des temps morts prévus (et prévisibles), trop longs, artificiels, inappropriés. Une gestuelle que l'on sent venir, avec des grands classiques, comme le point serré, les mains ouvertes, le visage grave, mais à des moments trop "parfaitement" appropriés, du coup même un néophyte sent que tout est calculé et non naturel.

Trop d'émotion tue l'émotion
J'ai cru à un moment entendre des violons en musique de fond, mais non, ce n'était que mon esprit critique ! J'ai même cru que DSK tentait de pleurer par moment. Bon trop c'est trop, à trop vouloir convaincre on risque d'obtenir l'effet inverse et tout homme politique qu'il est, rompu à l'exercice, il n'est pas encore prêt pour Hollywood et les Oscars. Plus de retenue aurait sans doute été plus approprié !

Un exercice à l'américaine
Finalement la plus grande faiblesse de son exercice vient de sa plus grande force : ses conseillers. Ils ont vraiment fait un travail fantastique sur la sémantique, les contenus, le fond, mais nous ont livrés un exercice à l'américaine, c'est à dire surjoué, trop calibré, trop prévisible, trop serré, trop propre. Vous savez comme les pubs ultra-brite, ou le type est parfaitement musclé, avec des dents parfaitement blanches dans un monde parfait. C'est beau, mais on a du mal à y croire. Cela a du faire carton plein au FMI, mais je doute qu'il en soit de même ici. Il ne faut pas jouer avec les sentiments de son auditoire sans être parfaitement sûr que tout le monde mordra à l’hameçon...


Alors au final, bien ou pas ?

Bon il ne faut pas oublier que c'est un exercice extrêmement difficile, très périlleux et DSK jouait gros sur ce coup là. Et finalement mieux vaut quelque chose de légèrement surjoué et quelque peu emprunté mais efficace, qu'un exercice léger et peu travaillé. Cela a, au moins, le mérite de montrer que le moment a été très travaillé et répété, donc qu'il a de l'importance et c'est déjà un pas de fait vers l'auditoire !

Mais, personnellement je regrette que ses conseillers Français n'aient pas eu plus de poids dans la préparation de son intervention, pas tant sur le contenu qui reste un très bon exercice, mais sur la forme, pour la "franciser" un peu plus. Du coup on regrette le brillant orateur, l'homme de caractère, de force de conviction, de décision, c'est d'autant plus frappant lorsque Claire Chazal laisse de côté "l'affaire DSK" pour s'intéresser à la politique, la finance, la mondialisation, on y retrouve un DSK extrêmement brillant, formidable orateur, maîtrisant parfaitement son sujet, montrant une belle assurance, un énorme charisme, se laissant même allez à quelques tacles en règle, bref un second visage que l'on aurait aimé voir sur la première partie pour être tout aussi convaincant...
Mais la vraie performance de cette soirée, vient sans aucun doute de TF1 avec 13,44 millions de téléspectateur... DSK ça fait vendre !

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